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Connu auparavant comme « ancien prieuré », « ancien manoir », « ancien couvent », ou tout simplement « les tours », l’histoire du château de la Neuville est encore aujourd’hui mystérieuse. Toutefois, une collecte d’archives, deux diagnostics archéologiques et une étude architecturale ont permis d’en apprendre plus et de dégager plusieurs étapes de construction.

 

Plan du château et appellation des différents éléments (Leynet, 2019)

Le bâtiment le plus ancien et encore présent aujourd’hui est la chapelle. Sa construction est estimée au XIIIe siècle. Un bâtiment devait y être accolé, comme en témoigne un ressaut sur sa façade est.

A l’époque, l’église et le fief de la Neuville dépendent de l’abbaye de Ferrières-en-Gatinais, située à environ 30 km.

Il semble que la volonté de l’abbaye est de créer un bâtiment défensif à même de stocker les denrées et redevances issues de l’exploitation foncière mais aussi symbole de sa puissance territoriale vis-à-vis du prieuré de Ligerville, situé à la sortie du bourg et qui dépendait de l’évêché d’Orléans. 

Le bâtiment est peut-être dirigé par un prieur, c’est-à-dire un moine dont la charge est d’administrer un domaine distant d’une abbaye. La construction est alors appelée un « prieuré ».

Suite aux destructions occasionnées par la Guerre de cent ans (1337-1453), Louis de Blanquefort, abbé de Ferrières de 1465 à 1505, ordonne sa reconstruction. Descendant d’une illustre et riche famille, il était le filleul de Louis XI et fut le chambellan de Charles VII. Il investit dans un vaste programme de rénovation des églises et autres édifices paroissiaux qui dépendaient de Ferrières-en-Gatinais.

La grande tour, les murs d’enceinte, la tour d’angle et le mur du logis datent de cette époque (fin du XVe siècle).

La grande tour, ou tour escalier, est la pièce maîtresse de l’édifice. Elle était probablement desservie par un pont levis comme en témoigne l’absence de gonds et un petit conduit cylindrique entre l’archère et la porte. Bien que la présence d’un fossé sur l’ensemble du pourtour soit peu probable (présence d’un puits), la tour escalier présente d’autres éléments défensifs typiques du Moyen-âge tels qu’une archère et une bretèche.

Dom Morin, auteur du XVIIe siècle ayant notamment écrit sur l’histoire du Gatinais, fait mention de pont-levis aux 3 niveaux de l’escalier pour desservir le logis attenant. Il n’y a pas de traces de ces dispositifs aujourd’hui mais d’autres exemples existent, notamment à Yèvre-le-Châtel.

Ces éléments (pont levis, archères, bretèches…) n’étaient plus en vogue à l’époque de Louis de Blanquefort. D’après les archéologues, il s’agirait ici d’une construction volontairement historicisante, « la tour seigneuriale médiévale », symbole ostentatoire de la richesse et de la puissance de l’abbé.

A la fin du XVIe siècle, durant les Guerres de religion, le château est incendié. Cela se passe peut-être en 1562, en même temps que l’incendie à Ligerville par l’Amiral de Coligny.

Au XVIIe, deux sources exposent des situations différentes pour l’édifice. Ainsi, on le trouve mentionné dans un dessin sous la terminologie de « fort », ce qui paraît cohérent avec le percement d’une ouverture pour le tir à l’arme à feu dans la petite tour.

A la même période, Dom Morin, grand prieur de l’abbaye de Ferrières, fait mention des ruines du château de la Neuville dans son Histoire du Gâtinais:

« un chasteau seigneurial fort ancien, (…) de beaux logements qui sont demeurez des ruines des guerres civilles avec un grand escallier tout de pierre qui sert pour monter aux chambres hautes, à chaque porte desquelles il y avait un pont levis pour entrer et un grand parc fermé de murailles dans lequel il y a une fontaine d’eau vive qui y coule ».

Nous avons peu de sources mentionnant le château après le XVIIe.

Comme beaucoup de vieux édifices, le château sert de carrière de pierres et est progressivement démonté.

Entre les Guerres de religion et 1836 (date du cadastre napoléonien), le corps de ferme est construit et des modifications parcellaires ont lieu (construction d’un mur entre la courtine sud et la grange).

 En 1887, Edmond Michel, dans son Monuments religieux, civils et militaires du Gâtinais, fait une description du château similaire à ce qu’on observe aujourd’hui.

En 1928, les ruines sont inscrites à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques. Cette inscription se fait en même temps que les ruines du prieuré de Ligerville et entraine une certaine confusion entre les deux sites.

L’exploitation agricole persiste jusque dans les années 1960. Une nouvelle modification parcellaire entraine la construction du mur de clôture situé entre la cour du château et le jardin, et le percement d’une brèche dans la courtine sud.

En 2001, la troupe des Minuits investit le lieu, laissé à l’abandon. Les ruines prennent le nom de Château des Deux Tours.

L’année 2016 est l’année qui marque le début de sa restauration.

Bibliographie :

  • BIZRI M., Diagnostic archéologique, Service de l’archéologie préventive Direction de l’Aménagement, Orléans, 2016, 85p.
  • LALLET C., Rapport de diagnostic, INRAP Centre Ile-de-France, Janvier 2019, 105p.
  • LEYNET T., Rapport d’étude préalable à la restauration générale, Agence Thierry LEYNET, Avril 2019, 45p.
  • MICHEL E., Monuments religieux, civils et militaires du Gâtinais (Loiret et Seine-et-Marne) du XIe au XVIIIe sècle, Edmond Michel, Herluisson, Orléans, 1887
  • MORIN G., Histoire générale des pays de Gastinois, Senonois&Hurepois, (1570? -1628), A Paris, chez la vefve Pierre Chevalier, ruë S. Jacques, à l’image S. Pierre prés les Mathurins. M. DC. XXX. Avec privilege du roy., 1630

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